Zârmalouloux Blog

12 avr. 2011

¡ Coinchés au pays des Kunas !




Il fait tellement chaud que les pales du ventilateur de la chambre peinent à découper l'air en tranche tellement celui-ci est épais. La sueur perle de mon front pendant que je noircis le papier. Cette fois plus de doutes, nous sommes bien à Panamá. Nous louons un appartement dans le centre historique de la capitale panaméenne pour une bouchée de pain -16 dollars par jour pour 8 personnes- et cela nous permet de disposer d'un four, de matelas, d'une salle de bain mais surtout plus rare, d'un réfrigérateur congélo. Et avec cette chaleur constante ce n'est presque plus du luxe.



Revenons sur les derniers évênements qui nous ont menés jusqu'ici. Retour à Turbo, Colombie. Pour quitter la Colombie et rejoindre le Panamá, il faut emprunter soit la voie aérienne, soit la voie maritime car il n´y pas de route praticable qui relie l'Amerique du sud et l'Amerique centrale. Nous avons donc été obligés de charger nos vélos sur de petites embarcations avant de trouver le Don Luis, navire de marchandises panaméen qui longe les côtes pour ravitailler les gens qui vivent sur le littoral. Nous étions partis pour câboter quelques jours dans l'archipel des San Blas avec l'objectif de gagner Carti, qui d'après nos cartes était le premier port perdu dans la jungle d'où débutait le chemin indispensable pour continuer á vélo. Mais c'était sans compter sur les petits contre-temps. Le navire mû par un moteur diesel, a subi dès notre deuxième jour a bord, une avarie au niveau de l'hélice que le capitaine et l'équipage ont tenté de réparer sans succès. Bon gré mal gré, nous avons continué comme ca. Nous découvrons au passage le peuple qui vit là.

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Les "Kuna Yala" vivent sur une trentaine d'îles de l'archipel de San Blas qui en compte approximativement 365, une pour chaque jour. Ils vivent principalement de l'agriculture qu'ils pratiquent sur les terres fertiles cotières, récoltant des quantités impressionnantes de noix de coco, et surtout du tourisme qui est une manne financière importante pour eux. Ils emmènent les gens sur les iles paradisiaques des caraibes et vendent leur artisanat, entre autres les "molas", patchwork elaboré, à tous ceux qui passent par là (voir photo ci-dessous). Les femmes principalement portent encore le costume traditionnel chamaré, ont les cheveux courts ceints d'un chale rouge et jaune, leurs bras et leurs mollets sont couverts de bracelets et de perles aux couleurs chatoyantes. Avec leur discret percing dans le nez, elles ont un charme exotique (les plus agées l ont souvent plus imposant, encore aujourd'hui).




Ce peuple possede une histoire récente forte, et a du, après l'oppression espagnole, se battre contre le gouvernement du Panamá pour acquérir un statut autonome dans la république panaméenne. Un soir que nous étions partis nous balader sur l'île d'Ustupu,Juan, un enseignant pasteur de l'ile, accompagné de sa femme, nous content l'histoire de leur peuple et les façons de vivre en géneral. Les récits de commerce avec les pirates, leurs leg linguistique qui a transformé la langue Kuna, nous hantent encore au petit matin lorsque le bateau quitte le mouillage, une fois n'est pas coutume, aux premières lueurs du jour avant que nous puissions dire au revoir à cet homme.
Son grand père, Olokindibipilele a été acteur de la révolution Kuna au début du 20 eme siècle. L'indépendance du Panamá en 1903 laissent beaucoup de peuples dans l'expectative. Les cultures indigènes sont mal considérées et les Kunas entre autres, subissent les affronts de la police coloniale. Des tentatives d'aculturation ont forcé les kunas à prendre les armes et attaquer par surprise plusieurs places fortes de la police sur différentes îles. Les Etats Unis s'en mêlent, fournissent des armes aux Kunas et font pression sur le gouvernement panaméen pour qu'il accede á la demande des Kunas. Finalement, aprés de nombreux affrontements, les Kunas obtiennent gain de cause en février 1925. Ils disposent des lors d'un territoire oú exercer leur propre souveraineté.


Au niveau de l'organisation sociale, chaque île possede son fonctionnement propre mais l'on retrouve partout le même systeme de prise de décision. Tous les jours ont lieu des conseils, auxquels nous avons pu assister (le matin pour les femmes et le soir pour les hommes). Les choses prennent le temps d'être discutées pendant parfois plusieurs semaines consécutives. Cela nous a semblé être une maniere plutôt intéressante pour faire jouer la démocratie car chacun peut participer au débat. Dans le conseil, quatre rôles majeurs se distinguent: le "saila" (cacique révoquable á n'importe quel moment), "suarider" le sous chef, celui qui a le baton, l' "Argar", celui qui chante, et le commun des mortels c'est á dire tous les autres qui se font taper dessus (;O).

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Nous avons le temps de découvrir tout cela car le bateau avance très peu chaque jour, voir reste á quai 3 jours durant á Playon Chico, en attendant un ravitaillement de diesel ou je ne sais quoi d'autre. Une certaine frustation s'empare de chacun à tour de role, nous qui sommes habitués à ne dépendre de personne pour avancer.

Le voyage aurait pu ressembler á cette piece de théatre de Sartre "Huit clos" dans laquelle trois personnes dans l'antichambre du paradis ( ou l'enfer comme on veut), sont obligés de vivre ensemble dans un espace réduit, sans savoir quand tout cela va finir. L'enfer c'est le rythme des autres! Mais bon on s'y fait. On dort en hamac pour certains, sur le toit pour d'autres, bercés par le doux remou de la mer. Et le matin, on se réveille aux premiéres lueurs du jour, avec le clapotis produit par les rames des pirogues que conduisent les hommes comme les femmes pour aller sur la jungle du continent, oú chacun cultive ses bananes, riz rouge, cacao, mais, coco, yuca... Certains reviennent de la chasse ou de la pêche nocturne.

Les Kunas vivent encore de maniére bien traditionnelle et en grande partie en auto-suffisance.
Les casitas (petites maisons) sont en branche de canne á sucre pour les murs et le toît en feuille de bananier. Il y a souvent une seule piéce et pas d'électricité. La structure tient avec des cordes et des noeuds, souvent, l'unique ouverture est pour entrer et sortir d'un côté et de l'autre, mais sans porte.



Apres 13 jours de galère, nous arrivons finalement á Carti et commence alors une autre paire de manche. Il y a bien une route. Mais honnêtement, je n'avais jamais vu ça. Il s'agit d'une route asphaltée, construite il y a 5 ans pour acheminer plus facilement les denrées vers les îles kunas depuis la panaméricaine. 42 kilomètres en pleine forêt tropicale, plus connue sous le nom de jungle du Darien, réputée impénétrable. Bon là c'est sûr que l'adjectif est un peu mal approprié puisque les machines ont littéralement tranché le massif d'ouest en est jusqu'à la mer, avec ou sans montagne c'était pareil. Du coup, les pentes sont inclinées a plus de 50% et seul les 4*4 peuvent passer. Et puis nous avec nos p'tits vélos rouillés à mort, plein de sel, aux pneus sousgonflés comme nos cuisses, on a eu fort à faire. Après "le run and bike" en Equateur, nous sommes passés à l'étape bobsleigh au Panama





Le bobsleigh (ou bob, bobelet) est un sport d'hiver, dans lequel une équipe de deux ou quatre personnes fait une descente chronométrée sur une piste glacée étroite et sinueuse, aux virages relevés, dans un véhicule (ou traîneau) caréné, orientable et mû par la gravité et les jambes des occupants au départ, pouvant dépasser les 150 km/h en compétition[réf. nécessaire]. Ses pratiquants sont appelés bobeurs (bobeuses chez les femmes). Cette définition n'est évidemment pas adaptée à notre histoire car au lieu de descendre uniquement, il nous a fallu également monter une piste en ligne droite sans virages en poussant un véhicule (ou vélo + charette) lourd, orientable certes mais largement freiné par la gravité et mû uniquement par les jambes et les bras des potes venus pousser pour éviter un retour á l'envoyeur. Nous nous retrouvons par moment á passer des murs de parfois presque 1 kilomètre à une allure inconstante de 2km/h. On s'est un peu senti dans la peau des "Rasta rocket". L'effort est intense mais nous sommes au coeur de la jungle oú résonnent les cris des singes hurleurs dans le lointain, les toucans nous dévoilent leur plus belles plumes, les serpents même viennent faire admirer leurs écailles.

Après approximativement 7 ruptures de chaîne, des petites gamelles, une crevaison et une grosse suée générale, nous faisons une halte salvatrice chez Rodolpho Juan Martinez qui nous accueille pour la fin d'après midi et pour la nuit. La rivière nous procure une eau de grande qualité, en témoigne la présence d'écrevisses. Nous profitons de l'aprés midi pour découvrir la faune et la flore, en quête d'animaux exotiques et fleurs inconnues.







Le lendemain, le relief reste á peu pres égal á lui même. Cette nouvelle épreuve nous méne aux limites du parc protégé des Kunas et á la petite école oú enseigne Olo ("or" en Kuna). Deuxieme représentation du spectacle en terre Kuna. Les enfants rient, l'alchimie opére, nous sommes ravis.
Nous passons toute l'apres midi en compagnie d'Olo qui, passionné par sa culture, nous gratifie d'un vrai petit précis d'histoire et de civilisation, nous offrant calendrier, anecdotes, livres et explications á la pelle, élargissant nos connaissances et ouvrant nos mentalités aux traditions de ce peuple trés attachant.

Deux jours nous séparent alors de notre objectif : la capitale.
Niveau relief, le pire est passé.
Il ne nous restera plus qu'á affronter les rigueurs de la chaleur, accentués par le traffic dense, les klaxons, les pots d'échappements, bienvenu en ville!

Panamá est une ville tout á fait étonnante et attachante.
Des quartiers d'affaire á l américaine narguent de l'autre côté de la baie, le centre hystérique (pardon, historique), avec ses colonnes, ses balcons, ses maisons colorées coloniales, parfois un peu décrépites ou laissées á l'abandon. Pas totalement d'ailleurs, la végétation tranquille et impassible suit son fil, reconquérant les murs, le sol, l'espace en général. Ce quartier est particulierement vivant, fournissant son lot de bars, discotheques et restos branchés, il est éventré par une rue piétonne gigantesque, bondée de magasins bon marché et de gens.
Un climat de joyeux bazar émane des quartiers oú nous avons séjourné, marquant nos mémoires d'images incongrues, violentes, drôles et belles.

A nous l'amérique centrale !!
On voue salue bien bas.
Affectueusement

Les zArMaLoUlOuX